- NEUROPHARMACOLOGIE
- NEUROPHARMACOLOGIELa neuropharmacologie constitue le chapitre de la pharmacologie qui concerne l’action des drogues, ou substances pharmacologiques, sur les nerfs et le système nerveux central. Il est d’usage de la séparer de la psychopharmacologie, discipline née de la rencontre de la psychologie, de la psychiatrie et de la pharmacologie, et qui s’intéresse aux effets des drogues sur les états psychiques; mais cette division est, en fait, assez arbitraire.La neuropharmacologie étudie donc les effets des drogues sur la conduction et l’excitabilité des nerfs, sur la transmission de l’influx nerveux entre les structures jonctionnelles, telles les synapses neuromusculaires et les synapses interneuronales. Elle décrit et tente d’expliquer les manifestations des drogues sur le tonus musculaire, les réflexes médullaires, les états de veille et de sommeil, les émotions, l’excitabilité corticale ou sous-corticale, le système extra-pyramidal. Chemin faisant, elle élabore des concepts physiologiques à partir des constatations pharmacologiques; dans ce domaine, elle revendique de solides succès, telle la théorie neurohumorale de l’influx nerveux.1. Drogues. Conduction et transmission de l’influx nerveuxPharmacologie de la conduction nerveuseCertains médicaments perturbent la conduction de l’influx nerveux. Ainsi celle-ci est ralentie ou supprimée par les anesthésiques locaux. En réalité, ces derniers agissent sur toutes les fibres nerveuses, mais leur action est d’autant plus puissante que les fibres sont plus fines; ainsi, les fibres de la douleur étant les plus fines, elles sont sensibles aux concentrations les plus faibles. Il est généralement admis actuellement que les anesthésiques locaux diminuent la perméabilité de la membrane des fibres nerveuses à l’ion sodium; celui-ci ne pouvant plus entrer dans la fibre, la conduction s’arrête [cf. ÉLECTROPHYSIOLOGIE]. À l’inverse, certains corps appelés labiliseurs – vératrine, par exemple – accroissent cette perméabilité; les fibres nerveuses répondent alors à un stimulus unique par des décharges répétitives d’influx dans le muscle et dans le nerf.Pharmacologie des structures jonctionnellesHistoriqueL’action des médicaments sur les jonctions nerveuses constitue l’un des chapitres fondamentaux de la neuropharmacologie, depuis que les pharmacologues ont mis en évidence, entre 1900 et 1940, le mode de transmission neurohumorale de l’influx nerveux, qui s’est substitué à celui d’une transmission électrique. Suivant cette théorie, le passage de l’influx nerveux d’un nerf à un muscle, ou d’un axone au soma d’un autre neurone, met en jeu un mécanisme purement chimique: l’action d’une substance spécifique, le médiateur chimique . Ce résultat découle de l’analogie constatée entre les effets de l’excitation des nerfs sympathiques ou parasympathiques et les effets respectifs de l’adrénaline et de l’acétylcholine. Les découvertes fondamentales furent effectuées, en 1921, par O. Loewi, puis par W. B. Cannon. Loewi montre que l’excitation du nerf vague (parasympathique) d’un cœur isolé de grenouille libère dans le liquide de perfusion une substance capable de ralentir un autre cœur. Cette substance devait bientôt être identifiée à l’acétylcholine. Par ailleurs, Cannon démontre que l’excitation des nerfs sympathiques, hépatiques ou spléniques accélère le cœur énervé d’un chat. Cette action ne peut se produire que par libération d’une substance, appelée «sympathine», qui sera d’abord identifiée à l’adrénaline, puis à la noradrénaline (U. S. von Euler, 1946; cf. CATÉCHOLAMINES). La preuve de la transmission chimique au niveau de la plaque neuromusculaire fut acquise en 1944; au niveau du système nerveux central, en 1953.Pour établir une corrélation entre une synapse donnée et un médiateur, il faudrait pouvoir répondre aux questions suivantes:– Cette molécule est-elle libérée par la terminaison nerveuse sous l’effet de l’influx nerveux?– Cette molécule, appliquée artificiellement au niveau de la synapse, y produit-elle des effets identiques à ceux de la transmission synaptique normale?– Les drogues qui modifient le fonctionnement normal de la synapse ont-elles les mêmes effets sur une excitation artificiellement provoquée par le médiateur supposé?– Existe-t-il au niveau de la synapse un système d’inactivation rapide de cette molécule?Mécanismes d’action des droguesLes progrès de la pharmacologie montrent que les drogues perturbent la transmission nerveuse de différentes façons:1. Au niveau du système nerveux autonome, les drogues peuvent mimer les effets du médiateur chimique. Ce sont: les parasympathomimétiques qui reproduisent les effets de l’acétylcholine sur les organes innervés par les nerfs parasympathiques; les nicotiniques , ou excitoganglionnaires, qui imitent les effets de la même substance au niveau des ganglions; les acétylcholinomimétiques , qui agissent comme l’acétylcholine au niveau de la plaque neuromusculaire; les sympathomimétiques qui ont des effets analogues à ceux de la noradrénaline sur les organes innervés par le système sympathique.Au niveau du système nerveux central, l’identité du médiateur excitant n’étant pas connue, il n’existe donc pas encore de classes de substances mimétiques; le médiateur excitant est un des deux diacides aminés: l’acide glutamique ou l’acide aspartique. Certaines substances miment les effets de ces acides sur la membrane neuronale. Il en est ainsi, par exemple, au moins à certaines doses, de l’acide kaïnique. Dans la moelle épinière du chat, le médiateur inhibiteur a été identifié avec un acide aminé, le glycocolle. Le rôle de médiateur de l’acide 塚-aminobutyrique (GABA) est établi dans l’action des nerfs inhibiteurs des Crustacés. Injecté par iontophorèse, il mime les actions pré- et postsynaptiques du médiateur, agit aux mêmes sites et est bloqué par les mêmes drogues. Dans le cerveau des Mammifères, le GABA est également présent; il crée une hyperpolarisation de la membrane et son action pharmacologique est donc inhibitrice; son rôle de médiateur inhibiteur a été établi dans de nombreuses structures: cervelet, cortex, hippocampe, etc.Des substances mimant l’action du GABA sont aujourd’hui connues et le muscimol est l’une des plus employées. Les benzodiazépines semblent interférer par un mécanisme complexe avec les récepteurs au GABA.2. Les substances pharmacologiques peuvent être des antagonistes en empêchant le médiateur de se fixer sur les récepteurs et d’y engendrer un potentiel d’action. Les antagonistes sont des parasympatholytiques , des ganglioplégiques et des curarisants pour l’acétylcholine, les adrénolytiques pour la noradrénaline. Au niveau spinal, la strychnine s’oppose à l’action inhibitrice du glycocolle et provoque des convulsions. La bicuculline a été reconnue comme un antagoniste de l’acide 塚-aminobutyrique.3. Les substances pharmacologiques peuvent perturber la synthèse ou le stockage du médiateur chimique dans les terminaisons préjonctionnelles, paralysant de cette façon la transmission de l’influx nerveux. Elles libèrent le médiateur, ou au contraire inhibent sa libération. Parfois elles se substituent à celui-ci, et sont libérées à sa place; ces «faux médiateurs», généralement moins actifs que la substance naturelle, diminuent donc l’efficacité de la transmission synaptique. Enfin, ces substances peuvent dérégler les mécanismes ioniques qui se déclenchent lors de la transmission de l’influx nerveux.On voit donc la richesse des interprétations que permet la théorie neurohumorale, et ce n’est pas un de ses moindres mérites.2. Réflexes et tonus musculaireCertaines drogues pharmacologiques perturbent les réflexes médullaires (fig. 1). Les réflexes monosynaptiques, ne mettant en jeu qu’une synapse d’une fibre sensorielle afférente à un motoneurone, sont le plus souvent résistants. En revanche, les réflexes polysynaptiques, mettant en œuvre une fibre afférente sensitive, des neurones courts – appelés interneurones – et un motoneurone, sont sensibles à un grand nombre de drogues. Ces poisons des interneurones spinaux et mésencéphaliques ont reçu le nom de relaxants musculaires et comprennent les barbituriques, les benzodiazépines et le méprobamate.De nombreuses drogues provoquent, le plus souvent, une chute du tonus musculaire (hypotonie) et, à plus forte dose, une paralysie flasque ascendante. La transmission neuromusculaire n’étant pas affectée, on en conclut que les drogues agissent directement sur le système nerveux central. Cette action, difficile à localiser, se situe soit au niveau de la moelle épinière, ce qui empêche les systèmes supraspinaux d’exercer leurs influences toniques sur les motoneurones, soit, comme pour le diazépam, au niveau de la formation réticulée bulbaire (fig. 2). Quoi qu’il en soit, cette dépression aboutit toujours à un amoindrissement des effets facilitateurs et inhibiteurs que la formation réticulée exerce sur les réflexes mono- et polysynaptiques spinaux.En fait, il existe deux systèmes qui accroissent le tonus musculaire (fig. 3):– Le système des grosses fibres motrices 見 innerve les fibres musculaires extra-fusoriales; son hyperactivité est obtenue par la décérébration ischémique: ligature des deux artères carotides et du tronc basilaire. Le méprobamate, le diazépam, la méphénésine agissent sur ce système.– Le système des fines fibres motrices 塚 innerve les fibres musculaires intrafusoriales; son hyperactivité est obtenue par la décérébration intercolliculaire: section du tronc cérébral entre les tubercules quadrijumeaux antérieurs et postérieurs. La chlorpromazine et de nombreuses phénothiazines neuroleptiques dépriment ce système; au contraire, certaines drogues sont capables d’accroître le tonus musculaire: ainsi la réserpine, la trémorine et l’oxotrémorine, bien qu’elles dépriment le système des fibres 塚, excitent davantage le système des fibres 見; l’imipramine augmente le tonus extenseur en déprimant spécifiquement l’inhibition présynaptique et l’inhibition directe récurrente qui s’exercent surtout sur les motoneurones extenseurs.3. États de veille et de sommeilDe nombreuses substances pharmacologiques sont capables de modifier les états de veille et de sommeil (cf. NARCOSE, SOMMEIL). Ainsi, les hypnotiques induisent le sommeil, tandis que les psychostimulants (amphétamine et caféine) l’empêchent. Les travaux de neuropharmacologie ont localisé le lieu d’action de ces substances au niveau de la formation réticulée mésencéphalique ascendante, responsable du maintien de l’état de veille (fig. 2).Certaines drogues, tels les hallucinogènes, agissent sur la formation réticulée bulbaire, inhibitrice naturelle de la formation réticulée mésencéphalique; la dépression de la formation réticulée bulbaire provoque donc l’éveil.L’analyse pharmacologique a révélé la présence de systèmes cholinergiques et adrénergiques dans la formation réticulée mésencéphalique. L’amphétamine entraîne, en effet, une réaction d’éveil et la libération de noradrénaline à ce niveau. Au contraire, la réserpine et la tétrabénazine provoquent le sommeil et la déplétion en noradrénaline. En outre, les drogues cholinomimétiques, susceptibles de traverser la barrière hémato-encéphalique, déclenchent une réaction d’éveil électro-encéphalographique, et l’atropine l’apparition d’un tracé électro-encéphalographique de sommeil. Toutefois, l’administration d’oxotrémorine dans certaines parties du tronc cérébral induit le sommeil paradoxal (ou sommeil rapide), caractérisé par une désynchronisation corticale et une perte du tonus musculaire. Des récepteurs muscariniques et même nicotiniques (activés respectivement par les parasympathomimétiques et la nicotine) sont à l’origine de l’activation corticale.Sommeil lent et 5-hydroxytryptamineLes progrès récents les plus significatifs ont souligné l’importance, dans la genèse du sommeil lent, d’une part des noyaux mésencéphaliques et pontiques du raphé médian, d’autre part de la 5-hydroxytryptamine (ou sérotonine). Le rôle de la 5-hydroxytryptamine dans la genèse du sommeil lent repose sur un nombre relativement impressionnant d’arguments.– La méthode d’histofluorescence révèle que les noyaux du raphé médian, se trouvant sur la ligne médiane, sont formés de cellules contenant de la 5-hydroxytryptamine.– La destruction électrolytique de ces noyaux chez l’animal engendre la perte du sommeil et une déplétion de l’encéphale en 5-hydroxytryptamine et en acide 5-hydroxy-indolacétique, produit d’élimination (fig. 4).– L’excitation électrique de ces noyaux déclenche, au contraire, le sommeil lent; la teneur en 5-hydroxytryptamine de l’encéphale s’abaisse, celle de l’acide 5-hydroxy-indolacétique s’élève; cette expérience conduit à penser que l’excitation électrique accélère l’utilisation de la 5-hydroxytryptamine.– La parachlorophénylalanine inactive la tryptophane-hydroxylase, enzyme qui catalyse la première étape de la synthèse de la 5-hydroxytryptamine; il en résulte une inhibition du sommeil; celui-ci est rétabli après administration de 5-hydroxytryptophane.– Les drogues – telle l’imipramine – qui empêchent le recaptage, c’est-à-dire le pompage, le stockage et par suite l’inactivation de la 5-hydroxytryptamine des espaces intercellulaires par les terminaisons des fibres nerveuses, favorisent le sommeil lent. Ce résultat est observé également avec les drogues qui, de même que les inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO), s’opposent au catabolisme de la 5-hydroxytryptamine.– Les antagonistes de la 5-hydroxytryptamine, tel le méthysergide, favorisent l’activité de veille et diminuent les deux phases du sommeil. Ils inhibent l’accélération de l’apparition du sommeil paradoxal provoqué par le tryptophane.Il faut noter que, si des expériences convaincantes ont été faites sur certaines synapses de l’Aplysie, on ne possède aucune certitude, dans le cas du cerveau des Vertébrés, que la 5-hydroxytryptamine joue un rôle de médiateur, bien que certains faits tendent à le prouver.Sommeil rapide, noradrénaline et acétylcholineLe sommeil paradoxal ou rapide est déclenché à partir du locus cœruleus. La présence dans ce noyau pontique de neurones contenant de la noradrénaline laisse supposer que cette substance est impliquée dans la genèse du sommeil paradoxal. En outre, l’apparition du sommeil paradoxal induite par l’ésérine peut s’expliquer par l’inhibition de l’acétylcholinestérase par cet alcaloïde, et l’accumulation consécutive d’acétylcholine. On arrive ainsi à une conception neurohumorale du sommeil permettant une «manipulation» pharmacologique.4. Noyaux bulbo-mésencéphaliquesDe nombreuses drogues perturbent l’activité des noyaux bulbo-mésencéphaliques impliqués dans la régulation de la vie neurovégétative. Ainsi, la morphine déprime les neurones respiratoires et les neurones sympathiques, pouvant provoquer apnée et hypotension; elle stimule les neurones vagaux situés au niveau du tractus solitaire et du noyau ambigu, ralentissant le cœur; elle excite le noyau de la VIe paire crânienne, provoquant le rétrécissement de la pupille (myosis). Ces actions sont consécutives à l’action sur des récepteurs opiacés spécifiques. La clonidine inhibe les neurones sympathiques bulbaires et excite les neurones vagaux, pour ceux-ci probablement au niveau du noyau du tractus solitaire. La clonidine agit sur des récepteurs spécifiques appelés 見2-adrénocepteurs. Un progrès décisif fut réalisé en 1953 quand H. L. Borison et S. C. Wang montrèrent le mécanisme d’action des émétisants. Le vomissement déclenché par certaines drogues survient en effet par excitation de récepteurs périphériques, généralement gastro-intestinaux comme c’est le cas avec le sulfate de cuivre. Au contraire, certaines drogues sont plus actives lorsqu’elles sont administrées par voie intraveineuse; leur activité est même plus intense lorsqu’elles sont introduites directement au niveau du bulbe. On avait classé ces drogues, morphine et apomorphine par exemple, comme émétisants centraux. Borison et Wang ont montré que leur activité disparaît après ablation de l’area postrema, région voisine de l’obex du bulbe, constituée de fibres nerveuses, de cellules gliales et de vaisseaux sanguins (fig. 5). Ils ont donc conclu que l’excitation du centre bulbaire du vomissement est secondaire à la stimulation de l’area postrema. Il est possible que l’area postrema soit impliquée dans d’autres actions pharmacologiques, comme une partie de la hausse tensionnelle provoquée par l’angiotensine; les noyaux bulbo-pontiques sérotoninergiques sont impliqués en partie dans l’action analgésique des morphinomimétiques.5. Hypothalamus et système limbiqueL’intégration des émotions et de la peur s’effectue principalement au niveau de l’hypothalamus et du système limbique (hippocampe, septum et en particulier amygdale, fig. 6). Certains tranquillisants, tels que les benzodiazépines (chlordiazépoxide, diazépam), dépriment ces régions et inhibent les réactions neurovégétatives, émotionnelles et électriques, qui apparaissent après stimulation du système limbique. Les neuroleptiques, les antidépresseurs, les benzodiazépines, ainsi que la destruction bilatérale des noyaux amygdalien, s’opposent à l’agressivité du rat porteur de lésions du septum. On en conclut que ces drogues modéreraient l’activité de l’amygdale.Les phénothiazines neuroleptiques et les antidépresseurs tricycliques accroissent la durée des convulsions d’origine rhinencéphalique, que l’on provoque en stimulant le noyau amygdalien; ces produits engendrent même parfois des convulsions spontanées. On a supposé qu’ils agissaient en réalisant une sorte d’ablation fonctionnelle de cette structure, d’où découleraient l’indifférence émotionnelle et, par là, l’amélioration de certaines psychoses.Au niveau de l’hypothalamus, les substances pharmacologiques perturbent la sécrétion des hormones antéhypophysaires, créant ainsi des troubles endocriniens.6. Excitabilité corticale, sous-corticale et noyaux gris centrauxLes substances pharmacologiques, phénobarbital, phénytoïne par exemple, diminuent l’excitabilité du cortex, ce qui justifie leur emploi dans le traitement de l’épilepsie [cf. ÉPILEPSIE].Au niveau des noyaux gris centraux (thalamus, corps strié), certaines substances permettent d’améliorer les troubles de la maladie de Parkinson, causés par des lésions du locus niger (fig. 7). La constatation que les substances antiparkinsoniennes sont des parasympatholytiques avait conduit à supposer que l’hyperactivité d’un système cholinergique était responsable de cette maladie. Cette conception fut étayée par la découverte d’une subtance parasympathomimétique, la trémorine, capable de passer dans le cerveau et qui produit des symptômes voisins de ceux de la maladie de Parkinson: tremblements, rigidité, acinésie, auxquels il faut adjoindre des signes périphériques (salivation, larmoiement, diarrhée, bradycardie). Les anticholinergiques inhibent les actions périphériques et centrales. En outre, l’administration du métabolite de la trémorine – l’oxotrémorine – dans la formation réticulée mésencéphalique ou dans le noyau caudé provoque le tremblement.Les travaux poursuivis depuis une vingtaine d’années ont conduit au concept d’un faisceau dopaminergique qui s’oppose au système cholinergique. Dans la plupart des organes, la dopamine est une catécholamine, précurseur de la noradrénaline (fig. 8); elle joue le rôle de médiateur au niveau du corps strié. L’intervention de ce faisceau repose sur les faits suivants:– On a constaté au niveau des noyaux gris centraux, à l’état normal, une teneur très élevée en dopamine (10 猪g/g).– On a mis en évidence, par les méthodes d’histofluorescence, l’existence d’un faisceau nerveux qui part du locus niger et aboutit au noyau caudé et au pallidum; ce faisceau est formé de cellules contenant de la dopamine (fig. 7).– On a démontré que les noyaux gris centraux des malades décédés de maladie de Parkinson renferment une très faible teneur en dopamine.– La dopa, précurseur métabolique de la dopamine (fig. 8), présente une efficacité thérapeutique dans la maladie de Parkinson: elle pallierait l’absence de la dopamine cérébrale.– Après administration parentérale de dopa, la concentration en dopa et en dopamine s’élève au niveau des noyaux gris centraux.– L’injection dans le locus niger de 6-hydroxydopamine, substance provoquant la dégénérescence des fibres dopaminergiques, diminue le taux de dopamine dans le néostriatum (noyau caudé et putamen).– La stimulation électrique du locus niger entraîne la libération de dopamine au niveau du putamen et de son métabolite, l’acide homovanillique.– Dans 60 p. 100 des cas, l’injection micro-iontophorétique de dopamine (à l’aide d’une microélectrode servant de micropipette) au niveau des cellules du noyau caudé inhibe leur décharge, comme le fait la stimulation du locus niger.– Les drogues, telle la réserpine, qui provoquent la déplétion en dopamine, sont à l’origine chez l’animal de la catalepsie et chez l’homme d’un syndrome parkinsonien. Les phénothiazines neuroleptiques se fixeraient sur les récepteurs dopaminergiques et c’est ainsi qu’ils donneraient lieu à des effets analogues à ceux de la réserpine.Les antiparkinsoniens classiques, outre leur action anticholinergique, inhibent le recaptage de la dopamine et augmentent la concentration de cette substance au niveau du récepteur. Les inhibiteurs de la dopa-décarboxylase du système nerveux périphérique accroissent la concentration en dopa au niveau des noyaux gris centraux; cette technique offre l’avantage d’utiliser des doses moindres de dopa et de réduire les effets secondaires périphériques.7. Conception monoaminergique des psychosesLa conception monoaminergique des psychoses repose sur l’interprétation des effets des drogues sur le métabolisme des catécholamines. Elle est encore sujette à caution, mais elle a ouvert de nouvelles voies en psychopharmacologie (fig. 9).1. Le fait que la réserpine produit une déplétion en catécholamines et en 5-hydroxytryptamine dans l’encéphale et constitue un traitement de choix des dérèglements expansifs de l’humeur a fait supposer que les états maniaques résulteraient d’une augmentation de l’activité de voies monoaminergiques.2. Les neuroleptiques (phénothiazines, butyrophénones, benzamides substitués) possèdent une propriété commune, à savoir le bloc des récepteurs dopaminergiques. L’antagonisme de la dopamine au niveau du système nigro-néostrié explique l’apparition du syndrome extra-pyramidal, c’est-à-dire des modifications de la tonicité musculaire et de la régulation des mouvements automatiques. Le bloc des récepteurs dopaminergiques du système tubéro-infundibulaire est responsable de l’accroissement de la sécrétion de prolactine. L’action antipsychotique résulterait du bloc des récepteurs dopaminergiques des systèmes mésolimbique et/ou mésocortical. La réserpine provoque des phénomènes analogues par déplétion de la dopamine. À partir de ces résultats, on a envisagé une hyperactivité dopaminergique dans les systèmes mésolimbique et/ou mésocortical au cours de la schizophrénie.3. À l’inverse, le blocage de la monoamine-oxydase (MAO), augmentant la concentration en noradrénaline et en 5-hydroxytryptamine dans l’encéphale, serait à l’origine de l’action antidépressive des inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO).4. Les antidépresseurs tricyliques (imipramine et dérivés) inhibent le recaptage de la noradrénaline et augmentent par ce mécanisme la concentration en noradrénaline au niveau des récepteurs noradrénergiques.L’influence de la 5-hydroxytryptamine a été récemment soulignée. L’imipramine et la clomipramine empêchent, aux doses les plus faibles, le recaptage de la 5-hydroxytryptamine par les neurones tryptaminergiques centraux, et agiraient ainsi sur l’humeur; la désipramine agit surtout sur le recaptage de la noradrénaline et par suite sur l’initiative motrice. Un antagoniste de la 5-hydroxytryptamine, le méthysergide, modifie les troubles de l’humeur dans la manie. Il semble donc que la 5-hydroxytryptamine contrôle l’humeur et la noradrénaline l’activité motrice.Ce rapide aperçu de la neuropharmacologie montre que les substances pharmacologiques agissent sur de nombreux systèmes cérébraux. L’accent a été mis à dessein sur les concepts neurophysiologiques, neuropathologiques ou psychopathologiques à l’élaboration desquels la pharmacologie a contribué. On entrevoit ainsi, d’une part, le rôle essentiel qu’elle joue en thérapeutique et, d’autre part, en quoi elle contribue à l’édification de la physiologie et de la physiopathologie.neuropharmacologie [nøʀofaʀmakɔlɔʒi] n. f.ÉTYM. Mil. XXe; de neuro-, et pharmacologie.❖♦ Didact. Partie de la pharmacologie qui étudie l'action des drogues ou des substances pharmacologiques sur les nerfs et le système nerveux central. || On doit à la neuropharmacologie la théorie neuro-humorale de l'influx nerveux.❖DÉR. Neuropharmacologique.
Encyclopédie Universelle. 2012.